Ombres de mes livres

 

… où j’ai cherché à esquisser les silhouettes des 
premiers possesseurs de mes livres anciens.
 
 
 
Jean-Baptiste de Becdelièvre, seigneur de la Busnelaye (1651-1736)
et Louis Marie Christophe, marquis de Becdelièvre
Le livre :

Nicolas Le Tourneux
L'année chrétienne
 
à Paris, chez Josset, 1698
Le fer du possesseur :


Ecu timbré d'une couronne comtale et entouré  par la marque :
D.D.I.B.BECDELIEVRE.DE.LA.BVSNELAYS.COMP.PROTOP.RÆ.

« De sable à deux croix tréflées au pied fiché d'argent
accompagnées d'une coquille de même en pointe »
Jean-Baptiste II de Becdelièvre
chevalier
seigneur de la Busnelaye et 
de la Seilleraye 
( Nantes 1651 - décembre 1736 )


Avocat général puis premier-président
de la Chambre des comptes de Bretagne 


Président à mortier au Parlement de Bretagne 

Extrait de l'Armorial général de France (d'Hozier)

Renée de Sesmaisons

mariée le 22 août 1677 à Nantes 
avec Jean-Baptiste II de Becdelièvre

fille de René de Sesmaisons, chevalier, 
seigneur de Tréambert et de Villeneuve 
 
Un magistrat breton moqué par la marquise de Sévigné.
Maintenu chevalier en 1670 :

Jean-Baptiste II de Becdelièvre, seigneur de la Busnelaye, ayant justifié, devant la chambre établie pour la réformation de la noblesse de Bretagne (comme l'avait justifié la branche du Bouëxic en 1669) « que leurs prédécesseurs s'étoient de temps immémorial gouvernés et comportés noblement et  avantageusement, tant en leurs personnes et biens, que partages, suivant l'assise du comte Geoffroi,  ayant toujours pris et porté les qualités de nobles  hommes , écuyers, messires et chevaliers » est maintenu avec son frère, par arrêt du 29 novembre 1670, comme issus d'ancienne extraction noble, avec faculté à Jean-Baptiste de Becdelièvre de porter la qualité de chevalier, et à Louis celle d'écuyer. 
Premier président de la Chambre des comptes de Bretagne :

Une très vieille institution de la Bretagne ducale indépendante : Itinérante à  l'origine, la Chambre des comptes de Bretagne a été installée à Vannes en 1369 par Jean IV, duc de Bretagne. Déplacée à Nantes par la duchesse Anne de Bretagne en 1492, elle était une cour souveraine spécialisée dans les affaires de finances.

La famille de Becdelièvre forme une véritable dynastie dans cette Chambre des comptes :

François de Becdelièvre en devient le premier président en 1633. Son fils Jean-Baptiste 1er occupe la même fonction, suivi de son fils Jean-Baptiste II qui prend le poste très jeune, comme on le verra au paragraphe suivant.

Hilarion-François, petit-fils de Jean-Baptiste II, devient premier président en 1753. Et son fils, Hilarion-Anne-Philippe restera à  ce poste jusqu'à la suppression de la Chambre des comptes en 1792.
Dans une lettre de Mme de Sévigné :

Jean-Baptiste II de Becdelièvre prend ses fonctions de Premier président de la Chambre des comptes en 1678. Il est très jeune (27 ans) pour un poste occupé habituellement par des magistrats chevronnés.
                                             
La marquise de Sévigné, dans sa lettre de Nantes à Madame de Grignan, le 27 mai 1680, écrit malicieusement à son propos :


« Il faut que je vous conte ce que c'est que ce premier président. Vous croyez que c'est une barbe sale et un vieux fleuve, comme votre Régusse; point du tout, c'est un jeune homme de vingt-sept ans, neveu de M. d'Harouys, un petit de La Bunelaye fort joli, qui a été élevé avec le petit de La Seilleraye, que j'ai vu mille fois sans jamais imaginer que ce pût être un magistrat; cependant il l'est devenu par son crédit et, moyennant quarante mille francs, il a acheté toute l'expérience nécessaire pour être à la tête d'une compagnie souveraine, qui est la Chambre des comptes de Nantes; il a de plus épousé une fille que je connais fort, que j'ai vue cinq semaines tous les jours aux Etats de Vitré, de sorte que ce premier président et cette première présidente sont pour moi un petit jeune garçon que je ne puis respecter et une jeune petite demoiselle que je ne puis honorer. Ils sont revenus pour me voir de la campagne où ils étaient ; ils ne me quittent point. »

Les magistrats de la Chambre des comptes ne semblent pas prendre plus au sérieux le jeune seigneur de la Busnelaye puisque le roi Louis XIV doit leur adresser une lettre de reproche :

« Nous avons été informés, que dans les différends survenus entre vous et le sieur de la Busnelaie, premier président de notre Chambre des Comptes de Nantes, vous avez manqué de considération pour lui, par la mauvaise conduite que vous avez tenue à son égard ; et comme nous sommes très mal satisfaits de votre procédé et que nous le désapprouvons entièrement, nous vous faisons cette lettre pour vous dire que notre intention est que vous rendiez, dans toutes les occasions ordinaires et accoutumées, audit sieur de la Busnelaye les visites et les honneurs que l'usage a introduits, sans que, pour quelque prétexte que ce soit, vous puissiez vous en dispenser. ».
Les compliments du chancelier de France :

Entre la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle de graves conflits opposent nobles et magistrats de Bretagne au roi de France.

Jean-Baptiste de Becdelièvre appuie le pouvoir dans cette période troublée, ce qui lui vaut cette mention d'Henri François d'Aguesseau, chancelier de France :

 
« Les trois Arnaud ont contribué à révéler à Louis XIV la force de M. de Becdelièvre, magistrat intègre et éclairé. Il exerça la plus honorable des magistratures, celle qui constitue arbitre dans les circonstances les plus délicates. M. de Becdelièvre fut consulté sur les affaires privées et sur celles d'une province jalouse de ses privilèges. »
 
Louis XIV ajoute lui-même : « L'intégrité, la sagesse et le caractère inflexible d'un seul ramènent les têtes exaltées, et il concilie ce qu'il me doit avec ce que  les Bretons attendent de son impartialité. »
Le château de la Seilleraye :

Le château de la Seilleraye est situé à Carquefou, à quelques kilomètres de Nantes.

Il est construit à partir de 1671 pour Guillaume d'Harouys, trésorier des États de Bretagne. Guillaume d'Harouys étant mort sans postérité, le domaine passe à sa tante Louise, mère de Jean-Baptiste II de Becdelièvre.

Jean-Baptiste et son fils terminent la construction du château durant la première moitié du XVIIIe siècle. L'intérieur du bâtiment est alors décoré de lambris qui recouvrent les murs peints au XVIIe siècle.
La famille de Becdelièvre :

Chérin, généalogiste des ordres du Roi, commence ainsi son rapport sur la demande présentée par la famille de Becdelièvre pour être admise aux honneurs de la Cour :
« Cette famille a pour auteur Guillaume de Becdelièvre, de la ville de Lohéac, en Bretagne, secrétaire en 1426 de Jean V, duc de Bretagne, lequel fut anobli par lettres de ce prince du 12 juillet 1442. »

Le petit-fils de Guillaume, Raoul de Becdelièvre, seigneur du Bouëxic, a été  ambassadeur de la duchesse Anne de Bretagne auprès de Charles VIII en 1489 puis auprès de Maximilien d'Autriche. Son fils Etienne était lieutenant de la ville de Rennes sous François Ier et Henri II.


La famille bretonne de Becdelièvre a fourni, du XVe au XIXe siècle, de nombreux militaires et magistrats: mestres de camp, brigadiers de cavalerie, conseillers d'état d'épée, gentilshommes de la chambre des rois, chevaliers de Malte, présidents au parlement de Bretagne, premiers présidents de la chambre des comptes, etc. 

Une branche cadette, marquis de Quevilly, est fondée au début du XVIe siècle par René de Becdelièvre (photo). On trouve parmi ses représentants un podestat d'Alexandrie, un premier-président au parlement de Normandie et un autre à la cour des aides de la même province.
Le livre porte un ex-libris manuscrit de 1810


 
Louis Marie Christophe de Becdelièvre (1783-1855), chevalier, marquis de Becdelièvre, seigneur d'Avaugour, de Mauves-sur-Loire et de La Brousse de Kerbra, est le descendant direct de Jean-Baptiste II de Becdelièvre (il est le fils de son arrière petit-fils).

extrait du Grand armorial de France

Le marquis de Becdelièvre est gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi sous Charles X et chevalier de Malte honoraire. Il est aussi membre du Conseil général de la Loire-inférieure.

Il réussit à acquérir le château de la Seilleraye qui avait été confisqué et vendu par suite de l'émigration de son frère aîné durant la Révolution.

NB : La terre de Tréambert en Mesquer avait été érigée en marquisat sous le nom de Becdelièvre en 1717 pour Guillaume-Jean, le fils de Jean-Baptiste II.
Sources :

> Dominique Lepage: Un jeune premier président de la Cour des comptes de Bretagne au XVIIe siècle

> Archives généalogiques et historiques de la noblesse de France 

> Jougla de Morena : Grand armorial de France, tome 2, pages 48 et 49

> Armorial d’Hozier 

> Famille de Becdelièvre sur Wikipédia

> Famille de Becdelièvre dans Infobretagne.com

> Chambre des comptes de Bretagne sur Wikipédia

> Hyacinthe-D. de Fourmont : Histoire de la Chambre des Comptes de Bretagne

> Madame de Sévigné : Correspondances. Bibliothèque de la Pléiade, tome II, page 950

> Marquis de Magny, Illustrations européennes... Livre d'or de la Noblesse

> Le château de la Seilleraye dans Wikipédia


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